Article dans Marie Claire de février 2002 - 1

OPÉRATION ESPOIR AVEC MARIE CLAIRE

AIDONS DES FEMMES À
SAUVER DES ENFANTS


PAR CATHERINE CASTRO
PHOTOS FRÉDÉRIC ANTHONE

PARTOUT SUR LA PLANÈTE, DES FEMMES SE BATTENT DE TOUTES LEURS FORCES POUR SAUVER DES ENFANTS. PARCE QUE LEUR COMBAT VIENT À BOUT DE TOUS LES FATALISMES, MARIE CLAIRE A DÉCIDÉ DE LES SOUTENIR EN MENANT, DURANT SIX NUMÉROS, L'OPÉRATION ESPOIR. CE MOIS-CI, LA FRANÇAISE FABIENNE NAUHAME NOUS OUVRE LE FOYER OÙ ELLE RECUEILLE LES ENFANTS ERRANTS DE LA GARE DE CALCUTTA. LISEZ, VOUS AUREZ ENVIE DE L'AIDER.

HOWRAH STATION, CALCUTTA.LES ENFANTS DES RUES ÉLISENT UN QUAI SUR LESQUELS ILS JOUENT ET DORMENT. À L'ARRIVÉE DES TRAINS, ILS BONDISSENT POUR Y GLANER BOUTEILLES VIDES ET JOURNAUX.

C

alcutta, avaleuse de destins, point de chute de tous les espoirs et désespoirs... Sur les quais de Howrah Station, la plus grande gare d'Asie, les enfants des rues traînent leurs guenilles, à l'affût de la moindre roupie. Dès qu'un train entre en gare, les gamins se suspendent aux portières, prêts à bondir pour glaner dans les wagons tout ce qui pourra être revendu: bouteilles de plastique vides, journaux, canettes...
Aucun autre lieu à Calcutta n'attire autant les enfants seuls. Des dizaines d'entre eux échouent ici chaque jour. Fugueurs ou orphelins, mais aussi perdus dans les mouvements de foule démesurés. Couverts de crasse, de poux, de bobos suintants, l'état des petits corps en dit plus qu'un long discours sur les conditions de vie à la gare.
« L'hiver, c'était dur, raconte sans trace d'émotion Anthony, un beau garçon d'une dizaine d'années. On dormait sur des journaux, on avait froid. Souvent, la police faisait des descentes en pleine nuit, nous frappait à coups de bâton et essayait de nous ramasser pour nous envoyer en prison ». La prison ? C'est le nom donné par les enfants des rues aux orphelinats gouvernementaux, où ils ont rendez-vous avec la faim, les mauvais traitements et la promiscuité. Le petit garçon aux yeux de braise et sourire de neige parle anglais et a l'œil vif de ceux qui s'adaptent à tout. En quelques années, il a fait de longs séjours à la gare, ponctués d'allers-retours « en prison », mais aussi dans des foyers d'accueil tenus par des associations caritatives. Il en aurait fréquenté une dizaine, fuguant à chaque fois pour recouvrer la liberté de Howrah Station. Si aujourd'hui il a réussi à se fixer, mais aussi à aller à l'école, apprendre l'anglais et trouver un apaisement, c'est grâce à une Française de 35 ans, Fabienne Nauhame, arrivée en Inde il y a deux ans. Anthony, comme Prakash, Rahul, Soumen, Sushil et les autres, est un rescapé de la rue. Dans le foyer qu'elle a créé, Fabienne en a recueillis treize comme eux, qui ont entre 4 et 12 ans. Le père de Rahul, le plus petit, lui a confié son fils parce qu'il ne pouvait le nourrir. Fabienne ne se charge que des garçons, parce qu'ils sont majoritaires à la gare. "En deux ans, j'ai peut-être vu dix filles sans famille. Et contrairement aux garçons, elles ne restent pas ; elles sont très vite prises en charge par des associations indiennes." Une façon pour les professionnels du social à Calcutta de limiter la prostitution enfantine.

 

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