Article dans l'édition de mars 2007 de Patapon (version texte)
Fabienne prend soin des Galopins !
Tiphaine, Thibault, Marie-Domitille, Jeanne-Lise et Pierre ont mené une enquête sur la vie des enfants pauvres de Calcutta.
Ils ont interviewé Fabienne Fichet, une jeune femme qui a créé une association : les Galopins de Calcutta. Elle a ouvert trois foyers, elle y accueille les enfants perdus.
Voici d'abord quelques informations :
- L'Inde est le 7e plus grand pays du monde et sa population est très importante, mais, 50% des Indiens sont très pauvres...
- ... et, peu d'enfants peuvent aller à l'école.
- C'est une ville surpeuplée, aussi, certains habitants vivent dans des bidonvilles, sur les trottoirs, dans les gares...
- On voit donc beaucoup d'enfants errer dans les rues ; sans maison où dormir, mais aussi, sans famille pour les aider.
- Calcutta est une très grande ville de l'est de l'Inde, on y parle surtout le bengali, l'hindi et l'anglais.
Thibault : Bonjour, Fabienne, nous sommes très impressionnés par ton travail avec les enfants de Calcutta, aussi, nous avons plein de questions à te poser.
Fabienne : Bonjour, les enfants, je suis contente de pouvoir répondre à vos questions, et je vous remercie de vous intéresser à d'autres enfants, à des enfants qui ont eu un départ difficile dans la vie... Alors... je vous écoute !
Tiphaine : Qu'est-ce qui t'a donné envie d'aller en Inde ?
Fabienne : Déjà, adolescente, j'étais fascinée par Gandhi1. Ensuite j'ai fait partie de groupements humanitaires et l'envie de faire beaucoup plus me hantait. Puis, j'ai lu la Cité de la joie de Dominique Lapierre2 et je me suis décidée à aller voir sur place.
Je suis partie à 22 ans pour travailler sur d'autres projets pendant 6 mois. Ensuite, j'y suis retournée plusieurs fois non seulement pour travailler, mais aussi pour voyager, jusqu'au jour où j'ai décidé de créer quelque chose pour les enfants qui vivent dans les rues.
"La prière est la clef du matin et le verrou du soir... On peut vivre plusieurs jours sans manger, mais non sans prier." Gandhi
Pierre : Pourquoi t'occupes-tu d'enfants pauvres ?
Fabienne : Quand je voyageais en Inde, j'ai vu beaucoup d'enfants dans les trains qui balayaient pour tenter de se faire quelques roupies. J'ai eu donc envie de les aider. Ici en Inde, beaucoup d'enfants n'ont pas accès à l'éducation, et si je m'occupe d'eux, c'est en partie pour leur donner accès, comme les autres, à l'éducation et à une enfance plus normale.
Marie-Domitille : Comment fais-tu pour avoir des habits et de la nourriture pour les enfants ?
Fabienne : Les vêtements viennent de France. On les récupère gratuitement et on les fait passer dès que quelqu'un se rend à Calcutta.On récupère en France l'argent qui nous permet d'acheter la nourriture ici même, mais aussi de payer les frais scolaires et médicaux, le loyer, les meubles, les salaires les gens qui travaillent au foyer, etc.
Jeanne-Lise : Est-ce que tu voudrais adopter certains enfants que tu accueilles ?
Fabienne : Non, car il faudrait que je les adopte tous pour être juste! Ah, une précision : Je n'accueille que des garçons, car les enfants qui vivent seuls à la gare sont des garçons, et je voulais m'occuper des enfants des gares en priorité. De plus en Inde, on ne peut mélanger dans une même maison garçons et filles. Mais si nous rencontrons des filles en difficulté, nous les aidons aussi en les dirigeant vers des foyers de filles.
Thibault : Est-ce que tu sélectionnes les garçons avant de les accueillir au foyer ?
Fabienne : Oui, il y a une sélection. Quand nous allons à la gare, nous prenons en priorité les garçons qui vivent seuls et qui n'ont pas de contact avec leurs familles. Ensuite, nous les prenons le plus jeunes possible. Quand l'enfant a de la famille, nous tentons de les réinsérer dans leur famille, mais cela ne marche pas souvent. Quand les enfants viennent d'autres organisations, nous recevons leur dossier en premier, et donc, nous lisons le dossier avant de prendre une décision.
Tiphaine : Est-ce que les garçons se disputent dans ton foyer ?
Fabienne : Oui, bien sûr ! Ils se disputent même sou- vent car ils vivent à environ 10 à 12 garçons dans un foyer. Mais ils ne se battent pas souvent. Il y a aussi des frères, comme Tarak et Sumir, ou Alam et Akbar, mais ils sont pareils : ils ne s'entendent pas du tout. Ils ne se ressemblent pas et ils n'ont aucun point commun. Ils préfèrent passer du temps avec leurs copains plutôt qu'avec leurs frères.
Pierre : Est-ce que, parfois, tu regrettes d'avoir recueilli des enfants, surtout quand ils ne sont pas sages ?
Fabienne : Non je n'ai jamais regretté d'avoir recueilli des enfants, même quand cela se passe mal et qu'ils ne sont pas sages. Quand ils ne sont pas sages, ils sont punis.
Marie-Domitille : Est-ce qu'ils doivent participer à la cuisine, au ménage, faire les lits... (comme nous à la maison) ?
Fabienne : Oui, tous les matins, ils doivent ranger leur chambre et la nettoyer, et, après tous les repas, ils doivent laver leur assiette. Ensuite, selon les jours, ils ont à tour de rôle des tâches à faire : vider la poubelle, nettoyer la salle d'eau...
Thibault : Est-ce que tu sais parler la langue des enfants de Calcutta ?
Fabienne : Je parle le bengali, mais en fait, j'oblige les enfants des foyers à parler anglais. L'anglais ici est une langue très utile et je veux qu'ils la connaissent. Ils ne comprennent pas au début, mais ils s'habituent et apprennent petit à petit. Donc avec eux je ne parle qu'anglais.
Jeanne-Lise : Jusqu'à quel âge les accueilles-tu ?
Fabienne : Jusqu'à 12 ans, mais aussi selon les places. Nous avons un foyer de petits, un foyer de moyens, et un de grands. Si l'un est plein nous n'accueillons plus d'enfants correspondant à l'âge requis dans ce foyer-là.
Marie-Domitille : Moi, je voudrais savoir s'ils ont des cadeaux à Noël et à leur anniversaire ? et par qui ?
Fabienne : À Noël, ils n'ont pas de cadeaux car on ne fête pas réellement Noël. Il y a des enfants hindous, musulmans et chrétiens. Cette année par exemple nous avons organisé une journée sport et un bon repas. Une personne venue de France a remis à chacun un petit collier.
Pour leur anniversaire, ils ont un cadeau donné bien souvent par les gens de France, sinon par moi. Je garde de côté les jouets que l'on me donne en France pour les anniversaires.
Tiphaine : Comment fais-tu pour les anniversaires si tu ne connais pas leur date de naissance ?
Fabienne : Quand ils arrivent, on leur donne une date de naissance. Bien souvent c'est leur date d'arrivée au foyer.
Pierre : Pourquoi les enfants sourient-ils, alors qu'ils sont pauvres, seuls, sales et mal habillés ?
Fabienne : Les enfants de la gare ne sourient pas tout le temps, mais quand on les prend en photo, ils sont contents et donc ils sourient. Ils ont aussi comme tous les enfants des moments de jeux où ils rient et sourient même s'ils sont pauvres et sales. Par contre, ils doivent traverser plein de moments où ils sont seuls, tristes, et où ils souffrent.
Thibault : Pourquoi y a-t-il des enfants qui ne veulent pas venir avec toi, même si tu leur offres une belle journée de détente, et qui préfèrent rester dans la gare ?
Fabienne : Certains enfants ne veulent pas venir en foyer parce qu'il y a des règles à suivre et qu'ils préfèrent rester à la gare, jouer, vérifier les trains, et être libres.
De plus beaucoup ont perdu confiance dans les adultes, et leur refaire confiance ne les intéresse pas. Parfois ils viennent au foyer, mais ils ne restent pas.
Un de nos garçons vient juste de retourner à la gare alors qu'il est avec nous depuis maintenant bientôt 2 ans. Il s'appelle Riazul. Nous allons essayer de le ramener.
Vous savez, ils sont toujours contents de voir des gens qui s'intéressent à eux, même s'ils ne veulent pas intégrer de foyer. Ils sont contents aussi car on leur donne à manger ou des vêtements.
Jeanne-Lise : Est-ce que tu veux rentrer en France ?
Fabienne : Non, je ne désire pas rentrer en France pour le moment, mais peut-être que je rentrerai un jour.
Marie-Domitille : Merci beaucoup, Fabienne, d'avoir pris du temps pour répondre à nos questions. Nous avons appris plein de choses sur les enfants pauvres de Calcutta, et nous nous rendons compte à quel point nous sommes gâtés de vivre en France. Nous t'embrassons bien fort et pensons à toi et aux Galopins.
Fabienne : Au revoir, et merci à vous !
Propos recueillis par Christine d'Erceville
Les Galopins de Calcutta,
mail :
contact@galopinsdecalcutta.org
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