Article du 1er mai 2003 du Journal de l'Orne
FABIENNE A FONDÉ DEUX FOYERS POUR LES GALOPINS DE CALCUTTA
Elle rêve d'une grande maison
Fabienne avec les enfants des deux foyers
Fabienne a abandonné ses «Galopins de Calcutta», en Inde, le temps de cinq semaines de vacances dans sa famille, à Sarceaux.
Cette jeune femme de trente-sept ans offre un toit et plus encore un avenir aux enfants de la gare de Calcutta. Quarante à quarante-cinq enfants, livrés à eux mêmes, vont et viennent dans cette gare. "Calcutta étant le terminus, le wagon restaurant leur donne ses restes. Les enfants ramassent aussi les bouteilles vides et journaux dans les trains pour les revendre".
Chaque enfant a son parrain
À vingt ans, elle faisait les nuits à La Poste, à Paris pour payer ses études d'aide éducatrice, tout en aidant bénévolement des associations à buts humanitaires. Elle va aussi passer cinq mois en Inde pour travailler bénévolement dans un orphelinat. "C'est après avoir lu le livre «la Cité de la joie» que j'ai eu envie de quelque chose". En mars 1999, elle lance son projet sur les enfants des rues et trois mois plus tard ouvre son premier foyer dans un appartement qu'elle loue, et dans lequel elle vit, au rez-de-chaussée d'une maison.
Elle en a créé un deuxième depuis. "Mais cela reste un petit projet familial. L'un abrite neufs garçons, l'autre cinq, âgés actuellement de cinq ans à seize ans. On les garde jusqu'à ce qu'ils aient terminé leurs études. Le but est de les aider à trouver un travail. Sept sont orphelins, trois n'ont plus qu'une grand-mère, les quatre autres ont soit leurs deux parents soit seulement leur mère. Le foyer est plus stable aujourd'hui. Les deux premières années, ça a été le chaos. Beaucoup sont partis. Depuis le départ, on a accueilli trente-six ou trente-sept enfants. Dans les quatorze qui restent, tous pratiquement sont partis avant de revenir. Ils ont des difficultés à suivre les règles. Mais depuis un an, ceux qui sont là depuis longtemps sont pratiquement tous stables. Seuls les nouveaux repartent".
Tout est sponsorisé et géré uniquement par l'association «Les Galopins de Calcutta», présidée par son père. "Ses membres sont essentiellement autour de Sarceaux et de la région parisienne" où vit Pascale, la trésorière, une amie Sarcelienne.
"Le groupe en France est bien solide. Des gens s'y sont greffés, Beaucoup de choses ont été organisées à Argentan. Il y aura d'ailleurs une soirée le 17 mai à Aunou-le-Faucon (organisé par le cabinet De Loynes, Century 21 Argentan-Falaise - voir JO du 24 avril).
Deux fois par semaine, des gens du foyer continuent à rencontrer les enfants de la gare
Pascale a fait aussi beaucoup d'actions dans la région parisienne".
D'autre part "à la suite d'un article de quatre pages paru dans «Marie-Claire» avec appel à parrainage il y a un an, des personnes se sont manifestées de partout. Chaque enfant a aujourd'hui son propre parrain, qui finance essentiellement l'école. Trois sont déjà venus voir leur enfant mais ce sont surtout des échanges de courriers, des envois de dessins..."
«L'école est rentrée dans la routine»
En plus de Fabienne, quatre personnes travaillent à plein temps "pour s'occuper du quotidien des enfants, du marché, de les emmener et les ramener de l'école s'il le faut" ainsi que deux cuisiniers à mi-temps. "Moi je m'occupe du suivi des écoles, du suivi médical, de contacter les parrains, je donne des cours aux enfants (aide aux devoirs scolaires)... Trois volontaires actuellement encadrent des ateliers, deux Françaises (jonglage, poterie, fabrication de bijoux, théâtre, aide au devoir avec si possible des cours particuliers) et un Indien qui donne des cours, en groupe, de conversation en Anglais. Ils parlent presque tous Anglais, une langue qu'il faut parler dans les petits offices, dans le milieu des affaires..."
Les grands confectionnent des cartes qui sont revendues en France et qui servent à financer leurs vacances. "Ainsi, à Noël, les enfants sont partis où ils le voulaient, certains à la plage, d'autre dans le sud de l'Inde".
Ce qu'ils aimeraient faire plus tard ? "L'un veut réparer les ordinateurs, un autre veut aller dans le sport, les autres petits ne savent pas quoi faire. Mais pour l'instant, tous sont encore en retard scolairement. Treize sont excellents mais dans des classes souvent plus jeunes. Ils ont entre un et trois ans de retard. Ce sera plus difficile pour les grands car ils resteront avec leur handicap scolairement. Celui de seize ans a deux professeurs particuliers, ce qui a un coût". Toutefois, "l'école leur plaît, il n'y a aucun problème pour y aller. C'est rentré maintenant dans une routine".
Notre Française a trouvé là-bas d'autres personnes sensibilisées par les enfants. "Il y a différents petits projets, des foyers, une amie américaine à une école et dispense des cours d'informatique, d'autres s'occupent de jeunes handicapés..."
Une maison pour s'agrandir
Les adultes du foyer continuent a se rendre à la gare deux fois par semaine. "On emporte avec nous des vêtements que l'on ne donne qu'en cas de nécessité, du savon, un pot de Bétadine pour soigner les petites blessures. Si elles sont plus importantes, on les dirige vers l'hôpital ou d'autres structures. Si l'un n'a pas mangé on lui donne quelque chose mais en général ils ont appris à se débrouiller. En ce moment, on fait des mini-interviews avec ceux qui sont là depuis longtemps pour voir ce qui serait possible de faire pour les aider".
Fabienne va profiter de son séjour pour voyager sur Internet à la recherche d'adresses de fondations susceptibles de la soutenir dans son nouveau projet. "On voudrait trouver le financement pour pouvoir s'agrandir, acheter une maison afin de regrouper tous les enfants et aller jusqu'à vingt ou vingt-cinq. Mais c'est tellement cher à Calcutta. Il faut compter environ 80 000 € (sans les taxes) pour une grande maison avec un petit terrain et dans notre quartier car les enfants étant insérés dans des écoles du secteur cela nous ferait des frais de transports".
Les deux foyers fonctionnent avec un budget commun d'environ 1 100 à 1 200 euros par mois (parrainages compris) dont 230 euros de loyer.
«Le fossé est énorme avec les nouveaux»
Elle a parfois eu l'envie d'abandonner "quand les enfants repartent. Mais l'idée m'a traversé l'espace de 5 minutes. Maintenant, même si on peut encore avoir des coups durs, les enfants se débrouillent bien scolairement, ils sont sympas, ils respectent les règles du foyer, il y a peu de bagarres. Maintenant, la difficulté est pour les enfants de la gare de s'intégrer dans le foyer. Les enfants vont à l'école, ont leur parrain, ils ont décoré leurs chambres de dessins... Les nouveaux sont bien accueillis par les autres enfants mais le fossé est énorme. Il n'y a pas de problème avec les petits. C'est surtout avec les dix-douze ans qui vivaient un peu en dur à la gare. Mais on va continuer d'essayer..."
M.T.
¤ Coordonnées de l'association :
«Galopins de Calcutta», 23 rue Fontaine Michon, 61200 Sarceaux
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